Ils avaient promis : plus jamais. Plus jamais ça. Plus jamais pour personne.
Never again disaient-ils!
Pourtant, depuis 616 jours, ma communauté, mes frères et sœurs en Dieu sont massacrés sous mes yeux, sous nos yeux.
Je regarde ces images; photos, vidéos; insoutenables. Je m’impose de les regarder. Par devoir de conscience. Parce que détourner les yeux serait trahir ma communauté.
Je suis mère, je suis témoin, je suis debout chaque jour et chaque nuit blanche aux côtés de celles qui refusent l’oubli.
Aujourd’hui, je parle pour ceux qu’on a fait taire.
Pour ceux qu’on a enterrés dans le silence.
Pour celles et ceux dont la voix a été arrachée, effacée, étouffée sous les décombres.
Comprenez! Ce n’est pas un “conflit”. Ce n’est pas une guerre.
C’est une extermination.
Un crime contre l’humanité.
Un génocide, un écocide, diffusé en temps réel, en haute définition, sur nos écrans allumés mais dans nos consciences endormies.
Des enfants, des femmes, des hommes innocents sont bombardés, torturés, brûlés vifs, pulvérisés dans les airs, démembrés, affamés, disparus à jamais.
Des familles entières rayées de la carte.
Et le monde regarde ailleurs... dans l’indifférence.
Les gouvernements se taisent.
Les médias tordent la vérité.
La communauté internationale a choisi la complicité.
Je le dis clairement :
L’inaction est une complicité.
Le silence est un choix, une position, celle qui se trouve du mauvais côté.
Chaque jour, une page de l’histoire s’écrit avec le sang de mes frères et sœurs de cœur.
Une page que ni le temps ni l’oubli ni la honte n’effaceront.
Nous, les Mères au front, nous berçerons d'un bras et brandirons l'autre.
L'amour de nos enfants, de tous les enfants est notre arme de construction massive pour la suite du monde.
Notre tendresse est insoumise.
Et dans ce vacarme de silence,
nous choisissons d’élever nos voix.
Nos voix pour les mères de Palestine qui dans leur prières pour la paix nourrissent l’espoir d’un
lendemain pour leurs enfants malgré les souffrances infinies qu’elles traversent.
Pour les enfants qu’on n’a pas laissé grandir,
qui meurent avant d’avoir eu la chance de vivre,
Ces enfants, victimes d’un génocide que trop de voix refusent encore de nommer, porteront à jamais les cicatrices des horreurs vécues. Leurs regards poignants, leurs corps affamés, leurs rires éteints nous révèlent l’indicible souffrance d’une génération brisée.
L’Histoire nous jugera.
Et chacun devra un jour répondre :
« De quel côté étais-tu, quand l’innommable avait lieu ? »
Alors aujourd’hui, plus que jamais,
nous affirmons que nous serons toujours du côté de la justice, du côté de la dignité, de la liberté.
Nous sommes, et nous resterons, du côté de l’humanité parce que ce n’est pas une question de communauté mais bien d’humanité.
*
Je tiens à exprimer toute mon admiration et mon profond respect envers les organisations PYM et M4P qui, depuis 106 semaines, prennent inlassablement les rues; qu’il pleuve, qu’il neige ou sous un soleil ardent. Je salue également les manifestants, les porteurs de pancartes, les voix fatiguées mais tenaces qui n’ont jamais cessé de répondre à l’appel semaine après semaine pour défendre la Palestine.
J’aimerais aussi exprimer toute ma reconnaissance et mon engagement aux côtés des Premiers peuples, qui ont manifesté un soutien indéfectible envers le peuple palestinien depuis le tout début. Je rends hommage plus particulièrement à Madame Ellen Gabriel, pour sa constance et sa sagesse qui me remplissent d'espoirs.
Ce qui se vit en Palestine résonne profondément avec l’histoire, avec les blessures coloniales et la réalité que vivent encore aujourd’hui les peuples autochtones ici.
De la rivière à la mer,
De l'île de la tortue à Gaza
nous continuerons à marcher,
à pleurer, à chanter, à lutter tous ensemble.
*Crédit photo : Maude Desbois